Discours du président du MSD à la clôture du symposium- Bruxelles, 2 juin 2018

À ce moment que tout le monde devine incertain, dégradant pour le Burundi, si  dégradant pour chacune des familles de tous les Burundais, si incertain pour chacun de nos enfants, pour l’avenir des filles et des fils du Burundi, si incertain pour nos compatriotes qui souffrent dans les camps des refugiés, incertain pour tous les citoyens qui ont le choix entre la mort et la faim, la torture et l’humiliation d’un tyran, je dois vous dire que pour toutes ces raisons, je garde  une détermination sans faille de résister à vos côtés.

Cette détermination, j’en suis certain, est partagée par de nombreux burundais. C’est une preuve pour mon engagement et mon acharnement sans concession à combattre un régime criminel.

Je pense aux résistants des camps de réfugiés de l’Ouganda, du Rwanda, de la République Démocratique du Congo et de la Tanzanie qui paient lourdement le prix dans la souffrance, et les représentants de la majorité silencieuse du Burundi, à tous je veux leur dire que leur courage glorifie notre honneur. Je salue donc avec respect chacun d’entre eux. Ils sont notre force, notre bouclier, notre espoir et surtout notre voie.

Chers compatriotes,

Chers amis,

La nouvelle Constitution issue du référendum illégal du 17 mai 2018 est une nouvelle déclaration de guerre au peuple du Burundi. Elle est aussi la privatisation des services de sécurité, transformés en véritable industrie de la mort et la répression. Des commandes ont été passées en Chine pour du matériel de construction des fours pour consumer les corps de leurs victimes. Des victimes bonnes à la disparition. Une disparition d’une vie, d’une histoire, d’un rêve et de l’humanité.

Les fours crématoires qui rappellent la triste histoire de l’extermination des juifs d’Europe, après plus de 70 ans de la déclaration de plus jamais ça, nous rattrapent ailleurs pour le même usage, et cet ailleurs c’est chez nous malheureusement au Burundi où sont broyés chaque jour hutu comme tutsi anonymement. Cette fois-ci, ils disparaitront dans le feu et l’anonymat.

La nouvelle Constitution, c’est la présidence à vie de Pierre Nkurunziza. C’est l’occupation du Burundi par la force criminelle et liberticide qui s’est appropriée les richesses des nôtres, et nos vies, en faisant de nous des esclaves.

Le peuple burundais est dans un total désarroi. Après des décennies de dictature militaire ponctuées de convulsions ethniques meurtrières, une présidence à vie de Nkurunziza Pierre, c’est le chagrin et la frustration, la peur et la résignation.

Le pouvoir et sa machine répressive  occupent nos maisons et la justice est muette. Ils nous chassent de nos terres et aucune plainte n’est reçue. Ils violent nos filles, nos femmes, et le juge ne juge pas et ne condamne pas. Nous sommes dans une telle situation au Burundi où même ceux qui travaillent ne sont payés que par des miettes qui ne permettent pas de nourrir leurs familles. Et dire que face à un tel désastre, la justice continue à légitimer les bourreaux qui crucifient le peuple burundais.

Voilà le Burundi que Nkurunziza Pierre nous réserve sous sa nouvelle loi fondamentale. Et ce tyran mystique a désormais tous les pouvoirs : le pouvoir de confisquer, d’exproprier, de posséder et de déposséder, de vie ou de mort sur les citoyens burundais.

Chers compatriotes,

Chers amis,

Cette nouvelle constitution, c’est aussi une théocratie laïcisée dans laquelle « Dieu » est le seul juge. Cette théocratie prend déjà forme dans cette constitution avec la prestation de serment du président « au Nom de Dieu le tout puissant ».

Dieu devient une arme pour le tyran, une arme redoutable, une arme de dissuasion. Quand Nkurunziza Pierre nous menace de mort, il nous fixe rendez-vous « chez Dieu » (au ciel). Quand il décide de déposséder les citoyens, il leur parle du « jugement de Dieu », donc sans appel. Quand il veut justifier sa corruption, il nous rappelle qu’il nous faut plus « croire en Dieu » et pas exiger la transparence. Pour expliquer notre misère, il nous demande de prier, beaucoup prier pour les lendemains meilleurs. La bible est à « Dieu », et notre bible politique, c’est notre accord d’Arusha. Jamais nous n’accepterons que ces Accords soient foulés aux pieds de qui que ce soit. Jamais ne nous accepterons qu’ils soient brûlés ou déchirés par des imposteurs.

Chers compatriotes,

Chers amis,

À ce détournement de « Dieu » pour des besoins autocratiques, quelle belle réponse que celle du Pape dans son discours à Bogota. Le pape François répond par un Dieu qui exige aux leaders un devoir de liberté : « Nous devons tendre vers des démocraties adultes, participatives, préservées des blessures de la corruption, de la colonisation idéologique, des prétentions autocratiques et de la démagogie à bon marché. », a-t-il dit. Cette démagogie à bon marché, le tyran la sert de force à ses citoyens qui la paient à un prix cher, très cher.

Le problème du Burundi n’est pas le CNDD-FDD. Ce n’est pas non plus les milices Imbonerakura qui exécutent avec excès de zèle les plans établis par des concepteurs de « la solution finale » contre les opposants. Ce n’est pas non plus cette démagogie à bon marché, encore moins l’idéologie dédaigneusement baptisée « d’idéologie du génocide ». Le problème c’est encore et toujours l’usurpation de la politique par l’armée.

Notre parti est déterminé à lutter jusqu’à la victoire finale contre la tyrannie. Le MSD va réinventer des corps de défense et de sécurité, respectueux de la constitution et du citoyen. Ceux-ci prêteront serment de désobéir à tout ordre de répression du citoyen dont ils ont, en réalité, pour mission sacrée de protéger.

La logique de la force ne peut longtemps s’imposer à la force de la raison. Nous rappelons aux forces de sécurité et de défense qu’ils ne doivent pas oublier qu’ils sont les enfants du peuple, qu’ils ont pour devoir de le respecter et de le protéger.

Chers compatriotes,

Chers amis,

Depuis plus de 50 ans, notre pays est entre les mains des dictateurs militaires qui viennent par le putsch ou par les élections. Ceux-ci ont dirigé et imposé leur volonté de puissance, manifesté le désir de maîtrise et de contrôle, et satisfait une envie de domination et la soif de soumission.  De Micombero Michel à Nkurunziza Pierre, notre patrie est sous le régime dictatorial et liberticide. Le régime qui tue. Il tue l’amour, l’amitié et le débat. Il divise pour régner.  Il empêche l’échange, la discussion et la parole en entretenant la peur et en faisant taire les medias. Il interdit l’avenir et le rêve.  Le peuple ne comprend plus ce qui lui arrive. Parce que Notre pays est en réalité sous occupation.

Toute cette tragédie n’a été possible que parce que notre peuple est tombé dans le piège de la division et la haine. Et Notre parti, le MSD, a alors décidé de démystifier ce piège à con, le piège ethnique.

Tous ensemble, hutu comme tutsi et twa, nous avons compris qu’il faut lutter pour la vie et éradiquer cette culture de la mort et de la haine. Tous ensemble, nous avons bien compris que la lutte qu’il faut est celle contre la misère et l’ignorance. Parce que notre peuple a droit à une bonne qualité de vie. Désormais, tous ensemble nous nous battrons pour le triomphe de la vérité parce qu’elle construit, libère et donc permet d’espérer. Ensemble, nous nous battrons également pour la justice et la liberté parce que nous en sommes convaincus que c’est la seule façon de donner la dignité à notre peuple. Voilà au MSD, c’est comme ça que nous agissons pour briser cette prison des divisions !

Chers compatriotes,

Chers amis,

La grandeur d’un peuple se cache toujours dans sa force de canaliser la colère, dans sa capacité d’indignation, dans son génie d’inventer, et dans sa vertu révolutionnaire.

Plus que jamais aujourd’hui, l’opposition doit s’unir pour résister ensemble. Plutôt que de désunir, penser à rassembler. Nos militants du MSD présents à ce Symposium ont recommandé de garder et de consolider la synergie avec d’autres partenaires politiques au sein de la plateforme CNARED. Vous avez également recommandé  d’agir pour une meilleure collaboration avec la société civile burundaise.

À ceux qui nous accusent de vouloir agir seul parce qu’ils ne nous connaissent pas, je leur demande une faveur : cherchez simplement à nous connaître. L’unité pour nous n’est pas un vœu pieu mais c’est un devoir. En ce qui nous concerne nous allons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour renforcer l’unité de notre peuple pour faire face au plus vite aux défis de sa libération.

Nkurunziza Pierre a déclaré la guerre au peuple depuis trois ans. La tyrannie de son régime ne cesse de s’intensifier. Avec la nouvelle constitution, elle se dote des bases légales. Il lui est désormais permis de tuer, de torturer, emprisonner, de violer des filles et des femmes, d’exproprier, de confisquer, d’exiler, d’écraser et d’humilier.

À tout cela, notre résistance c’est la réponse. La résistance c’est la vie. Résister c’est exiger la liberté, la vérité et la justice. Résister c’est bâtir la fraternité et la solidarité. Résister c’est le triomphe de la morale.

Ce ne sont pas les Congolais, les Tanzaniens, les Rwandais, les Ougandais, les Belges ou les Français qui vont se faire tuer pour nous et à notre place. La résistance, nous devons la mener tout seuls, pour l’intérêt de notre peuple et pour la libération de notre patrie. Le peuple doit se battre pour un Burundi libre et meilleur. Ce combat pour la liberté doit se faire tous les jours. Le peuple à Bujumbura, Rumonge, Kayanza, Muyinga…et partout dans le pays et ailleurs,  doit savoir qu’il faudra se battre collines par collines, rue par rue, maison par maison,  pour la libération totale de notre pays.

Chers compatriotes,

Chers amis,

La vérité, l’humilité et Ubuntu triompheront, j’en suis sûr, de la barbarie du tyran. Nous savons que nous ne sommes pas seuls, ils sont solidaires mais ils peuvent pas se battre à notre place. Le meilleur soutien que peut nous apporter nos amis de la communauté régionale et internationale est de renforcer l’isolement politique, économique et diplomatique de la tyrannie burundaise.

Vive la solidarité entre les peuples !

Vive le Burundi libre, démocratique et sans exclusion !

La lutte continue !

Je vous remercie.


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